Madame ou Monsieur le Maire,
À la Libération, 1 450 entreprises produisaient de l’énergie électrique et assuraient son transport. La loi de nationalisation issue du programme du Conseil National de la Résistance, loi adoptée le 8 avril 1946, a donné naissance à EDF. Cet établissement public à caractère industriel et commercial a permis le développement national et coordonné de la production et de la distribution de l’électricité. On peut regretter son changement de statut décidé le 19 novembre 2004, la transformant en une société anonyme à capitaux publics.
En dépit de ce changement de statut d’EDF et de la privatisation en juillet 2008 de GDF,
autre exploitant devenu alors GDF-Suez, les ouvrages hydroélectriques demeurent
propriété de la Nation. Les concessions, soit leur exploitation, d’une partie d’entre eux
(49 ouvrages dans un premier temps) doivent faire l’objet d’un appel d’offre international
selon une décision prise en juillet 2008 par Jean-Louis Borloo alors ministre de l’Écologie, du Développement durable, des Transports et du Logement. Et ce, dans le cadre de la
libéralisation de l’énergie.
Ces ouvrages hydroélectriques construits et entretenus avec les deniers du contribuable usager, sont depuis longtemps amortis. Tels ceux du Drac et du lac Mort en Isère dont le
renouvellement des concessions doit être soumis à appel d’offre. Il ne serait pas tolérable
que des opérateurs viennent exploiter ces ouvrages à la seule fin d’en tirer des bénéfices
substantiels.
Par ailleurs, les « Stations de transfert d’énergie par pompage » (STEP) comme l’ensemble
de Grand-Maison, ne remplissent plus l’une des fonctions pour lesquelles elles avaient été
conçues, celle du pompage de l’eau, aux moment des « heures creuses », du réservoir
inférieur vers le réservoir supérieur Et ce pour des raisons financières, le coût de l’énergie
électrique nécessaire à ce pompage étant devenu trop élevé pour EDF conduit à payer une
redevance à RTE (Réseau de transport de l’électricité).
Ainsi, au fil du temps, les intérêts financiers tirés de la gestion des ouvrages et du transport de l’énergie électrique prennent le dessus. C’est la raison pour laquelle la mission de service public qui avait présidé à la création d’EDF et de GDF est de plus en plus écornée.
Que deviendra-t-elle si les seuls intérêts financiers prévalent désormais ? Il est à craindre en effet que la sécurité des barrages ne soit plus assurée, de même l’intérêt général, le respect de l’environnement, le développement touristique autour de ces retenues d’eau ou les besoins connexes d’irrigation.
La sécurité des ouvrages est le fruit de la longue expérience des opérateurs actuels, de leur connaissance du terrain, du professionnalisme de ses salariés. Ainsi, EDF forte de sa longue pratique (elle surveille 640 barrages), assure cette sécurité à travers ses unités de
production et d'ingénierie régionales et nationales (Direction Technique Générale de
Grenoble et Centre d’Ingénierie Hydraulique du Bourget du Lac). EDF est et doit rester le
garant de la sécurité des ouvrages hydroélectriques.
Ces ouvrages hydroélectriques constituent un patrimoine national. L’unicité de l’ensemble
doit être préservée dans le respect des orientations du programme du Conseil National de la Résistance. L’hydraulique est un bien commun, il doit le rester !
Ajoutons que dans ce débat, il importe d’associer les élus de proximité, les citoyens et les
salariés et leurs organisations syndicales directement concernés par les menaces de
démantèlement de ce service public.
Ce sont toutes ces raisons qui motivent notre courrier.
Nous tenions à vous faire part de notre réflexion sur cette évolution néfaste à nos yeux du
marché de l’énergie électrique en souhaitant que votre conseil municipal ait l’occasion de
délibérer à ce sujet, comme l'ont fait ceux des communes d’Allemont et de Champ-sur-Drac.
Nous vous invitons, si vous en partagez les grandes lignes, à vous joindre à nos
interventions auprès du gouvernement pour que les décisions attendues prochainement
soient conformes au choix de service public. Nous tenons à réaffirmer que la production
comme la distribution d’énergie électrique doit être de la responsabilité d’un vaste pôle public de l’énergie à reconstruire dans la fidélité à l’esprit du programme du Conseil National de la Résistance.
Veuillez agréer, Madame le maire, Monsieur le maire, nos respectueuses salutations.
Pour l’ensemble des organisations constitutives du
Front de Gauche de l’Isère
Gérard Beck Gérard Chouteau