À l’attention de M. Renaud MUSELIER
Président de la Région SUD
Hôtel de région
27, Place Jules Guesde
13 002 Marseille
Monsieur MUSELIER,
Nous vous avons adressé, en date du 18 mars, un courrier vous demandant officiellement la
gratuité des transports, durant la période de confinement, afin que ceux qui ont nécessité à se
déplacer puissent le faire dans les meilleures conditions, ainsi que l’arrêt de votre projet
d’ouverture à la concurrence. À ce jour, vous n’avez daigné répondre à l’organisation syndicale
majoritaire chez les cheminots.
Devons-nous en conclure à un mépris de votre part ou bien à une indifférence ?
Puisque les échanges avec vous, ou vos services semblent compliqués, même en dehors de
cette période particulière, nous allons donner dans cette expression les raisons de notre
demande.
Lorsqu’un Président de la République prend la parole, avec solennité, demandant l’unité
nationale contre un ennemi commun, déclarant la guerre à cette pandémie, il serait mal venu
que durant cette même période des cheminots reçoivent un courrier, conformément à la loi,
leur notifiant que bientôt il serait possible qu’ils ne fassent plus partie de la SA Voyageurs du
Groupe Public Unifié SNCF. Nous ne pensons pas que cet acte, lié à votre projet d’ouverture à
la concurrence, soit de bon augure envers celles et ceux qui assurent un service public de
transport essentiel en s’exposant.
Si nos réflexions étaient si saugrenues, vous n’auriez pas décrété d’accorder la gratuité aux
soignants qui sont engagés contre la pandémie du Covid-19. Mais il aurait été plus pertinent de
l’étendre à tous les usagers.
Durant des années, sous prétexte de manque de clarté sur les comptes de la SNCF, vous avez
privé le service public de près de 44 millions d’euros par an durant 3 ans. Vous avez estimé
arbitrairement que 300 millions d’euros pour assurer un service public de transport étaient
trop importants.
De plus, vous avez joué sur la corde sensible, en invoquant des problèmes réels de qualité de
production. Malgré le contentieux financier, les cheminots, consciencieux, sont parvenus à
améliorer la qualité du service public. D’ailleurs, ce sont toujours eux qui font les frais de telles
politiques.
Il est bien dommage que vous n’ayez eu comme seule attitude de nous dénigrer.
Ceci étant dit nous ne sommes pas rancuniers, mais particulièrement agacés.
Agacés de découvrir qu’après nous avoir privés des ressources nécessaires pour assurer le
service public, vous débloquez, dans le cadre de l’ouverture à la concurrence, des sommes
considérables et une régénération totale du parc roulant, en laissant la convention actuelle
courir, pour offrir des lots clés en main. Si avec cela ça ne marchait pas mieux, il faudrait nous
consulter, car les cheminots ont su faire plus avec des moyens bien plus réduits.
La convention actuelle prévoit une rémunération de 300M€ pour tout le TER PACA.
Nous sommes consternés de lire que vous prévoyez pour les deux seuls lots Azur et liaisons
des métropoles Marseille-Nice 237 M€ de rémunération par ans sur 10 ans. Soit la quasi totalité
de ce qui est donné aujourd’hui pour l’ensemble, pour seulement 33% du trafic demain.
Après ouverture à la concurrence, la facture du TER coûterait au conseil régional et donc
aux contribuables de PACA plus de 400 millions d’€.
Pire vous prévoyez, pour le peu de développement qu’il y aurait, que ce soit réalisé avec une
polyvalence accrue, une déshumanisation des gares et des trains et des suppressions
conséquentes d’emplois chez les cheminots. Et nous n’insisterons pas sur l’augmentation des
tarifs pour les usagers puisque vous l’imposez déjà, par l'augmentation de la "carte Zou".
Matériels neufs, 95 millions pour faire de nouveaux ateliers, une rémunération en
augmentation… si vous nous aviez donné tous ces moyens, au lieu de les garder pour tenter de
les donner à d’éventuelles entreprises privées, nous en serions aux 700 trains jours pour
desservir tout le territoire PACA au lieu des 542 que vous nous avez imposés, depuis votre
arrivée à la tête du Conseil Régional.
Ce sera plus cher et les citoyens de notre Région n’auront pas plus de trains. Nous l’affirmons
avec conviction et nous continuerons de le faire jusqu’à ce que chaque citoyen de notre Région
sache ce que vous allez faire de l’argent public et du mandat qu’ils vous ont confié lors des
élections.
Depuis les Assises régionales des Transports, vous avez construit une stratégie pour valider
votre projet d’ouverture à la concurrence. Personne n’est dupe et rapidement chacun qui a à
cœur de voir le service public jouer son rôle dans notre région, vous demandera des comptes
et nous serons avec eux.
Aussi, s’il vous reste une once d’humanisme et de respect pour toutes les composantes de la
société civile, nous vous demandons de mettre fin à votre projet qui commence déjà à coûter
inutilement de l’argent ; rappelons les 200 000€ que vous offrirez également à chaque
candidat…
Les volontaires à la reprise des lots devaient se manifester avant le 31 mars, vous avez décalé
de 15 jours, effet Covid-19 oblige. Nous vous demandons solennellement, une fois de plus, de
stopper purement et simplement tout projet d’ouverture à la concurrence et de nous attribuer
les moyens que vous avez économisés sur notre dos pour ce projet, afin que nous puissions
enfin développer le transport ferroviaire sur notre région.
Vous l’aurez compris nous nous positionnons clairement contre l’ouverture à la concurrence
qui va faire perdre des moyens financiers et techniques, alors que l’entreprise SNCF intégrée a
démontré sa capacité, dans l’histoire de notre pays, d’un développement ferroviaire massifié,
avec une empreinte carbone la plus basse parmi tous les modes de transport.
Dans l’attente de vous lire, de vous entendre, ou nous l’espérons de tous nos vœux, de nous voir
après ce terrible épisode humain, nous vous adressons nos sincères salutations de
syndicalistes.
Le Secrétaire Général du Secteur,
François TÉJÉDOR