Un mois de travail et, au final, une « plateforme commune » : six mesures en faveur des retraites, accompagnées de six autres mesures destinées à les financer. Il sagit là du résultat d’un processus initié au mois de décembre à Saint-Denis, lors d’un meeting rassemblant les forces de gauche contre la réforme des retraites. Depuis, d’autres rencontres avaient eu lieu, non seulement entre les organisations politiques, mais aussi avec les salariés en lutte depuis le 5 décembre.
Une motion de censure est envisagée
Ce processus a abouti à une plateforme de mesures en faveur des retraites sur lesquelles pas moins de treize organisations politiques de gauche ont réussi à se mettre d’accord. En présentant, hier, ce projet, seule la France insoumise était absente… Ce qui n’a pas empêché deux de ses députées, Clémentine Autain et Caroline Fiat, de participer à la conférence de presse aux côtés de Fabien Roussel, Olivier Faure (PS), Sandra Regol (EELV) et d’autres parlementaires de la gauche. « Nous ne sommes pas venues parler au nom de collègues », précisait Clémentine Autain, qui rappelait également que la France insoumise avait présenté son propre contre-projet de réforme des retraites. « Il s’agissait d’abord de voir ce qui nous rassemble », insistait Fabien Roussel. Olivier Faure, à l’intention des insoumis, soulignait que « nous restons ouverts à tous ceux qui le veulent ». Le même jour, le groupe GDR présentait ses vœux. La semaine dernière, les insoumis et les deux autres groupes de la gauche ne s’étaient pas entendus sur le dépôt d’une motion de censure contre le gouvernement. Pour autant, cette option est toujours envisagée. « Il y aura indéniablement une motion de censure, rappelait André Chassaigne, le président du groupe GDR. Mais nous le ferons en temps voulu. Pour l’instant, l’heure est à la mobilisation sociale. »
L’absence de FI n’entamait donc pas la satisfaction de pouvoir présenter une plateforme commune. Avec celle-ci, les treize organisations signataires proposent « six piliers pour de nouveaux droits ». D’abord, « améliorer le système par répartition », en opposition à « la substitution, même partielle, de cette solidarité publique par des démarches de capitalisation ». Ensuite, « garantir un droit à la retraite en bonne santé pour toutes et tous », en posant comme « exigence préalable la fin des mesures consistant à allonger la durée de cotisation ». « Notre système de retraite n’est pas en faillite, son déficit est creusé par la politique du gouvernement », assurent les parlementaires. La gauche propose également une « règle d’or », assurant « la parité du niveau de vie entre les retraités et les travailleurs, dans le public comme dans le privé », ainsi qu’une « meilleure prise en compte de la pénibilité ». Cinquième pilier, les partis politiques entendent garantir « une retraite minimum au niveau du Smic pour une carrière complète ». Et, pour les carrières incomplètes, ils se sont mis d’accord pour une « réforme du minimum vieillesse, pour qu’il ne soit pas en deçà du seuil de pauvreté » (1 040 euros). Dernier axe, enfin, l’égalité femmes-hommes : les élus considèrent qu’elle « implique de réduire la fracture salariale entre les hommes et les femmes ».
L’emploi des seniors « doit devenir une priorité »
Le dispositif prévoit en outre six « pistes de financement » : « mobiliser les fonds de réserve des retraites ou une partie des fonds de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades) qui seront disponibles à compter de 2024, au moment de l’extinction de la dette de la Sécurité sociale ». La plateforme réaffirme aussi « le financement par la cotisation sociale » et veut « interroger » l’utilité et l’efficacité des politiques d’allégements de cotisations sociales. Les treize organisations chiffrent à 66 milliards le coût de ces allégements dans les finances publiques. « Réfléchir à des ressources nouvelles » est la troisième piste de financement, visant notamment les revenus financiers : « S’ils cotisaient à l’assurance-vieillesse à un taux égal à celui des employeurs du secteur privé, ce serait 30 milliards de recettes à la clé. »
Les élus veulent également maintenir « la cotisation à 28,1 % jusqu’à 27 000 euros de revenus par mois ». « Le projet du gouvernement table sur la perspective d’un chômage élevé », rappelait le sénateur (PCF) Pierre Laurent. Or, la « création d’emplois, notamment dans les services publics », est la cinquième piste de financement du système de retraite de ce projet commun. L’emploi des seniors, notamment, « doit devenir une priorité ». Enfin, la gauche compte financer ses mesures grâce à l’augmentation des salaires et l’application réelle de l’égalité salariale entre les femmes et les hommes.
Maintenant que ces propositions sont sur la table, les partis signataires de la plateforme déposeront des amendements pour les mettre en œuvre lors du débat parlementaire. Même si, ainsi que chacun l’a souligné devant la presse, chaque formation reste libre de proposer son propre projet.