Par Marie Bellan
Publié par : http://www.lesechos.fr
Le : 02/07
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En déplacement vendredi à Lille dans une entreprise d'insertion, le
ministre de l'Economie sociale et solidaire a défendu le modèle
économique des coopératives qu'il souhaite voir se développer pour
privilégier les reprises d'activité par les salariés.
Hamon veut créer un nouveau statut pour les coopératives
C'est un secteur discret. Et pour cause. Bien que l'économie sociale et
solidaire (ESS) regroupe plus de 10 % de l'emploi privé en France, ses
acteurs sont d'une telle disparité qu'ils ont souvent du mal à parler
d'une seule voix. Associations d'un côté, coopératives, mutuelles et
fondations de l'autre se partagent inégalement le secteur : les
premières forment le gros des troupes (77 % des emplois de l'ESS sont
dans les associations), quant aux autres, elles détiennent le capital.
Les temps sont peut-être en train de changer. Avec un ministre délégué,
Benoît Hamon, rattaché pour la première fois au ministère de l'Economie,
l'ESS s'affiche comme un secteur à part entière. « Ce n'est pas
seulement une économie de la réparation, mais aussi un levier potentiel
de croissance », aime à rappeler Benoît Hamon, lors de ses déplacements.
Reprise d'entreprise modèle
Vendredi, il se trouvait à Lille pour visiter une entreprise d'insertion
du groupe Vitamine T, créée après la cessation du site par Thompson en
2008. Un modèle de reprise d'entreprise par les salariés et à vocation
sociale, que le ministre aimerait voir se dupliquer : « Il y a chaque
année 200.000 emplois qui disparaissent faute de repreneurs alors que
les entreprises concernées sont saines. Elles ne dégagent pas forcément
une rentabilité à deux chiffres, mais elles sont viables », souligne-t-il.
Pour tenter de préserver ces emplois, et dans la perspective de plans
sociaux qui risquent de se multiplier dans les prochains mois, le
cabinet du ministre réfléchit à la création d'un nouveau statut
juridique pour les coopératives, entre l'entreprise classique et la
SCOP, pour faciliter la reprise de l'activité par les salariés. Ces
derniers ont rarement le capital suffisamment pour racheter leur
entreprise. Et ils ne peuvent faire appel à des capitaux extérieurs qu'à
un faible niveau, sous peine de perdre la majorité des parts. Pour
l'heure, ce nouveau statut n'est qu'à l'état de projet mais il pourrait
s'inscrire dans le projet de loi sur les licenciements abusifs préparé
par le ministre du Travail et attendu pour la fin de l'année. Tout comme
le droit préférentiel de reprise par les salariés évoqué par Benoît
Hamon jeudi dernier lors de la visite du Groupe Chèque Déjeuner, une des
plus belles réussites de SCOP en France.
Au-delà de ces réformes législatives, le ministre de l'ESS a aussi fait
part à Lille des nouveaux instruments qu'il compte obtenir pour le
secteur. A commencer par les 150.000 emplois d'avenir promis par le
président de la République et réservés au secteur non lucratif ou à
lucrativité limitée. Tous ne seront pas fléchés sur l'ESS mais elle
pourrait en hériter d'une large partie. Pour les obtenir, Benoît Hamon
plaide pour une logique d'appel à projets, « de manière à s'assurer de
la crédibilité des projets et donc de la pérennité des emplois associés ».
500 millions de la BPI
Enfin, le ministre espère obtenir une part importante des futurs crédits
distribués par la Banque publique d'investissement (BPI). Une somme qui
pourrait atteindre 500 millions d'euros. Mais attention, « si nous avons
les 500 millions d'euros de la BPI, il faudra s'en servir beaucoup mieux
que les 100 millions que nous avons obtenus du grand emprunt et qui ont
été une vraie usine à gaz », prévient Claude Alphandéry, principal
fondateur de l'économie sociale et solidaire et ancien directeur général
de France Active.
Il s'agit de revendications qui pourront être portées à la conférence
sociale de la semaine prochaine par les deux principaux syndicats
d'employeurs de l'ESS, l'Usgeres et le Syneas, conviés pour la première
fois à participer à ce type de consultation.
ENVOYEE SPECIALE À LILLE
MARIE BELLAN