Par : Claude Alphandéry, président du labo de l'ESS et président
d'honneur de France Active
Publié par : LE MONDE ECONOMIE
Le : 02.05.11
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S'il y a un domaine qui devrait aujourd'hui susciter l'indignation,
c'est bien la puissance démesurée d'une oligarchie financière qui est à
la source des crises que nous traversons.
Pourquoi, alors que la richesse a crû beaucoup plus rapidement que la
population en France, y a-t-il 5 millions de personnes sans emploi ?
Pourquoi l'échelle des salaires dans l'entreprise peut-elle désormais
atteindre des sommets insupportables, de 1 à 1 000, et au-delà, alors
que de grands capitalistes comme Henry Ford ou JP Morgan, jugeaient, il
y a moins d'un siècle, que 1 à 20 était le maximum acceptable ?
Pourquoi, alors que nous avons consenti 4 500 milliards d'euros d'aides
aux banques européennes depuis la crise de 2008, ne sait-on encore rien
ou si peu de l'utilité sociale et environnementale de notre argent, de
notre épargne ?
Pourquoi des milliards d'euros de subventions publiques sont accordés
aux entreprises sans réelles contreparties sociales ou
environnementales, ni évaluation sérieuse de leur efficacité, alors que
le moindre euro octroyé aux associations est soumis à un contrôle de
plus en plus strict et coercitif ?
Nous pourrions malheureusement multiplier les exemples à l'infini. Nous
voyons au coeur de ces déséquilibres profonds un déficit fondamental de
démocratie économique.
Le citoyen est réduit à subir l'économie, en tant que consommateur,
travailleur, épargnant ou contribuable. Une abstention économique subie
qui conduit à la résignation, au repli sur soi, et nourrit, au final, la
montée des extrêmes. Tout cela n'est pas acceptable et doit nous indigner !
Mais il n'y a pas de fatalité. Sur tous ces sujets, l'économie sociale
et solidaire (ESS) propose des réponses concrètes.
Loin des G20 mais proches des gens, des centaines de milliers d'hommes
et de femmes, salariés, bénévoles, entrepreneurs de l'économie sociale
et solidaire démontrent au quotidien, en France comme ailleurs dans le
monde, qu'il est possible de vivre autrement son rapport à l'économie et
à l'entreprise, de manière plus solidaire, plus démocratique.
Des banques éthiques comme le Crédit coopératif et la Nef démontrent la
possibilité d'un argent utile et investissent pour soutenir l'économie
de long terme et appuyer le développement d'entreprises d'utilité
sociale et environnementale.
Des entreprises d'insertion comme Envie prouvent que personne n'est
inemployable et créent de l'emploi pour des dizaines de milliers de
personnes exclues du marché du travail.
Les association pour le maintien d'une agriculture paysanne (AMAP) et le
réseau Cocagne inventent une nouvelle relation, directe et équitable,
entre des dizaines de milliers de consommateurs et producteurs, et
assurent une juste répartition de la valeur ajoutée sur l'ensemble de la
filière.
Des associations comme France active mobilisent des centaines de
millions d'euros en faveur de ces initiatives et prouvent que la finance
peut être utile et solidaire. Mais cette économie sociale et solidaire
ne propose pas une alternative clé en main, qui sonnerait la fin du
capitalisme.
Ses réponses, partielles mais réelles, perfectibles mais concrètes,
constituent néanmoins une véritable réponse aux enjeux sociaux actuels.
Elles redonnent espoir sans promettre le grand soir, en ouvrant le champ
des possibles.
Elles montrent que des alternatives existent et peuvent se développer à
grande échelle, à condition de les faire connaître et de les soutenir.
En 2011, en France, plusieurs rendez-vous permettront aux citoyens de
venir à la rencontre de cette nouvelle économie au service de l'humain.
En dehors de la quatrième édition du forum Convergences 2015 à Paris,
les 3, 4 et 5 mai, le deuxième Parlement des entrepreneurs d'avenir, les
12 et 13 mai à Nantes, cherchera à faire émerger des idées et pratiques
nouvelles en matière de responsabilité sociétale des entreprises.
Du 16 au 23 juin, Ashoka conviera, à Paris, son réseau international de
3 000 entrepreneurs sociaux.
Enfin, du 17 au 19 juin, les états généraux de l'ESS rassembleront tous
les acteurs français autour d'un événement festif et citoyen à Paris.
Festif car l'espérance est joyeuse et conviviale. Citoyen, car il nous
permettra d'affirmer avec force notre message : nous, citoyens, voulons
et pouvons reprendre la main sur l'économie.
Claude Alphandéry, président du labo de l'ESS et président d'honneur de
France Active