Françoise Perroud vit avec 7,50 € par jour. Photo le DL/Vincent OLLIVIER
C’est ne pas partir en vacances, ne pas manger de la viande tous les jours, faire les vide-greniers, comparer les prix, acheter beaucoup d’occasions, ne pas aller au restaurant ou au cinéma, demander des cadeaux utiles pour Noël…
Dans son appartement HLM à Beauregard, Françoise Perroud décrit sans fard “la galère”. Dans ses mains, son budget tient sur une feuille de bloc. Rien de superflu, uniquement le nécessaire. « Quand je déduis toutes les charges, il me reste 7,50 € par jour pour me nourrir, me vêtir, payer l’essence… »
Sa plongée dans la pauvreté coïncide avec une séparation. Son mari est parti, la laissant avec ses deux enfants. « Je n’avais qu’un travail de secrétaire à mi-temps. Trois mois après, je l’ai perdu. »
Des années de vache enragée et de sacrifices. « Je me suis levée certains matins avec une seule pièce dans le porte-monnaie. Je me privais pour mes enfants. »
En grandissant, ceux-ci ont eu de plus en plus de besoins. Françoise les a vus pousser avec souvent, un pincement au cœur. « Je n’avais pas un sou à leur donner pour aller manger une pizza avec les copains. Heureusement, j’ai eu des gosses super. Ils auraient pu mal tourner. Aujourd’hui, ils sont sortis d’affaire. »
« C’est difficile de se dire qu’on est fauché »
Dans ces périodes difficiles, elle peut compter sur la solidarité. Celle de la famille. Ou bien des commerçants. « Certains connaissaient ma situation. Quand je demandai un steak, le boucher m’en mettait deux sans rien dire. Une dame à la fin du marché me donnait tous ses invendus. » Des gestes qui réconfortent, mais Françoise Perroud ne cache pas que le découragement l’a guetté plus d’une fois. « C’est difficile de se dire qu’on est fauché, on a l’impression d’avoir raté sa vie, alors que ce n’est pas ça » confie-t-elle.
Elle vit seule désormais dans son HLM. Son revenu mensuel flirte avec le seuil de pauvreté. Elle continue de raisonner avec comme unité de mesure les 7,50 € quotidiens.
Une situation dont elle accepte de parler ouvertement, alors que beaucoup de gens dans sa situation par pudeur ou honte préfèrent l’anonymat. « C’est une façon de militer sans doute, et d’ouvrir les yeux sur les situations des gens qui ont travaillé mais sont dans la précarité » dit-elle. Tout en confiant que son énergie et sa volonté cachent parfois aussi des coups de blues. « Ceux qui me connaissent le savent. Mes enfants m’ont permis de tenir le coup… »
par Lionel ARCE MENSO le 10/12/2010 à 05:18